Romans pour préados

Martine ne sait rien faire / Dominique Périchon / Rouergue

Cette illustration, son côté désuet, la liberté qui en émerge me fait penser au film « Camille redouble », pas vous ?

Martine ne sait rien faire. J’aime beaucoup ce titre. Parce qu’avec sa forme négative et la référence à Martine qui sait tout faire et qui va partout et qui est une fille de ce temps désormais révolu -Martine fait les courses, Martine en montgolfière, Martine embellit son jardin, Martine petit rat de l’opéra, bref Martine fait des tas de trucs dans 61 albums- on comprend bien que notre Martine de ce roman-là sera une anti-héroïne. On a clairement envie d’ajouter au titre « Martine ne sait rien faire » l’injonction « et alors ? »

Ben oui, et alors ? Est-on obligé d’être exceptionnel pour être apprécié ? Non, bien sûr que non. C’est tout ce que ce roman démontre à la perfection. D’ailleurs, il faudrait se demander ce que c’est, qu’être exceptionnel. Car nous le sommes tous, pas besoin d’être super connu, de remplir des zéniths ou d’avoir traversé un océan à la nage (Spoil alerte : je coulerais au bout de 3 mètres car je pratique la nage du petit chien qui se bouche le nez, si le pourquoi du comment de cette nage toute personnelle vous intéresse, c’est par ici). Chacun possède des qualités, des compétences, des sensibilités qui font de lui un être exceptionnel.

Sauf que. Quand on est enfant, on a besoin d’être valorisé, encouragé, récompensé. Et Martine fait clairement partie de ses enfants qui n’ont pas eu de médailles et autres trophées. Dans les compétitions qu’on fait parfois subir aux enfants, elle a toujours été dernière. Elle n’a même jamais pu rivaliser en faisant preuve d’un esprit de compétition. Car elle a toujours été fidèle à elle-même :

« Quand on ne sait rien faire, on est rarement récompensé, encore plus rarement honoré. C’est normal. En tous cas, c’est la coutume. Aussi, Martine avait-elle été épargnée jusqu’alors par les premiers prix et les félicitations, par tous les chamois, les tritons et autres ragondins d’argent dont on décore volontiers les enfants pour les habituer à être plus forts que les autres. Et que les enfants adorent. Bref, toutes ces médailles en toc lui étaient passées sous le nez depuis toujours ».

Je suis un peu Martine dans l’âme, pour tout vous dire. Du moins, quand j’étais enfant. Bon ok, j’ai vécu quelques moments de gloire dont je peux un peu me vanter, comme par exemple la fois où je suis arrivée à une audition de piano, que je me suis assise devant l’assemblée – 50 personnes maximum dans la salle de réception d’un hôtel de campagne mais pour moi c’était le Stade de France, sachez-le- que j’ai dit à ma professeure que non, je n’avais pas besoin de partition et que j’ai joué mon concerto comme Hélène Grimaud, par cœur et avec perfection. Bon, c’est ainsi dans mes souvenirs parce que si ça se trouve j’ai massacré le morceau. Ne demandez pas à ma maman de rétablir la vérité, elle vous dira sans nul doute qu’Hélène Grimaud s’est inspirée de ma prestation ce jour-là. Oui, il y a eu ce moment incroyable mais de manière générale, je suis plutôt de la team de la loose ou de l’éternelle deuxième. Comme la fois où, dans le cadre d’un concours de cuisine en CM2, on devait créer une recette en débutant par son écriture, que j’avais imaginé un « professeur au gratin » et qu’on m’avait refoulée en me disant que c’était dommage, j’aurais pu gagner et aller cuisiner mon prof en rouflaquettes d’aubergines avec les autres gagnants régionaux mais que j’avais oublié d’inscrire les ingrédients sur ladite recette. En même temps, oublier les ingrédients ? Oublier, quoi. L’histoire de ma vie. La voilà la vérité, je n’ai jamais reçu une quelconque médaille, même en chocolat. Alors quand, il y a trois ans, j’ai gagné, avec ma jolie famille en bazar et recomposée, une compétition familiale d’athlétisme qu’organisait le club de ma fille, j’ai exulté. La coupe sponsorisée Bricoumarchou est dans la chambre de ma fille mais j’aurais très bien pu l’exposer dans ma chambre à moi. Je n’étais pas seule dans l’histoire, c’est vrai, mais j’ai tout donné et mon 100 mètres était digne des plus grands sprinteurs de l’histoire des sprinteurs. Bref, j’étais ENFIN arrivée première et j’avais une preuve.

Vous avez compris l’idée ? N’est pas héros ou héroïne qui veut. Qui peut. Ce n’est pas faute d’essayer.

Tout comme Martine. Elle a tenté beaucoup de choses qui n’ont rien donné ou plutôt si, des « fiascos dans le monde de la gastronomie, du camping et de l’agriculture ». Sa carrière musicale n’a jamais décollé non plus.

Cela laisse Martine indifférente. C’est ce qui est dit. Parce qu’en vérité, lorsqu’elle est mise en avant, récompensée, honorée dans la suite du récit, c’est un sentiment nouveau qui s’offre à elle : la fierté. Et la reconnaissance, aussi. D’avoir trouvé une amie qui la comprenne, l’encourage, la valorise et l’embarque dans ses projets, même les plus fous. Cette amie, c’est Isidora. « La nouvelle ». Qui vient d’un autre pays, par-delà l’Atlantique. Et qui est surtout hyper intimidante.

« Debout dans la cour ou assise dans la classe, elle avait le maintien de ces antiques félins sacrés, l’air serein et indifférent. Isidora avait 10 ans, 70 ans ou un siècle et demi, on ne savait pas ».

Les élèves ne savent pas comment réagir face à elle. Personne ne le sait véritablement.

« Ils ne la repoussaient pas pour autant, ne l’ignoraient pas davantage, et une certaine forme de respect s’installa finalement. On n’imagine pas les anciens Égyptiens agir autrement avec leurs sacrés chats ».

Personne ne le sait ? Saut peut-être Martine. Les deux jeunes filles n’ont rien en commun, vous l’aurez deviné. L’une se considère comme banale et presque transparente, l’autre est charismatique et extrêmement intelligente dans des tas de domaines. Qu’est-ce qui peut bien amener ces deux écolières à se fréquenter et à devenir amies, alors ? La réponse, on l’aime, on l’adore : les livres ! Oui, mille fois oui. Parce qu’Isidora souhaite ramener « son poids en livres » depuis la bibliothèque de l’école jusque chez elle, Martine propose son aide, elle qui habite dans le même quartier. Jour de chance, heureuse coïncidence, signe du destin ? On peut interpréter ce moment de bien des façons mais une chose est certaine : il a changé la vie de Martine à tout jamais. Elle a trouvé sa Isidora !

Il fallait que cette rencontre aboutisse à une invitation. Vous savez, CETTE invitation que certains enfants attendent et ne reçoivent jamais. Et bien, Martine l’a reçue, enfin.

Isidora vouvoie. Parce qu’elle a appris la langue ainsi. Et c’est joliment désuet.

Isidora est ce genre d’enfant qui s’émerveille de tout et surtout, qui cherche à comprendre. Elle est du genre à démonter les réveille-matins. « A vouloir comprendre pourquoi le soleil est rouge le soir, la lune rousse la nuit ». Tandis que Martine est ce genre d’enfant qui se laisse porter et évite de tenter certains trucs au risque de créer des catastrophes. Elles sont ces genres d’enfants oui, mais si elles sont très différentes, elles possèdent cette chouette capacité commune, qui n’est pas donnée à tout le monde : celle de rêver.

« Le temps gagné à ne pas parler du temps qu’il fait, elles le passent à rêver »

On devrait tous faire ainsi. On ne prend plus le temps de rêver, pas vrai ?

Leur rêve ultime. Voler. Pour des raisons disparates. On comprendra celle d’Isidora bien plus tard dans le récit et cela expliquera tout mais ce n’est pas si important de savoir. Ce qui est davantage essentiel, c’est la façon dont les deux petites filles vont se lier autour d’un projet fou, fantasque, fantastiquement fou : celui de créer une machine volante. Et c’est génial d’accompagner ses génies -humbles héritières de tous les savants-fous aux cheveux blancs en broussaille- chacune avec ses intentions et ses compétences. Et c’est encore plus génial de réaliser, pour Martine et en même temps que Martine, que « quelqu’un sur cette planète avait besoin d’elle ». Certaines phrases sont comme des claques que l’on se prend en pleine face. Bien sûr que tout enfant devrait ressentir cela, la fierté de se savoir utile et nécessaire. Avoir besoin de quelqu’un. Quant à l’honneur qui est promulgué, à posteriori, il vous met à terre, littéralement

Elles voleront jusqu’au pays des éléphants. C’est le rêve de Martine. « Un jour, quand elle sera grande, elle prendra l’avion pour se rendre en Afrique et voir les pachydermes gris balancer leur trompe près des fleuves. Un jour, quand elle était petite, elle s’était fait cette promesse, la main droite levée vers le ciel. Puis elle a craché sur la tête de sa poupée préférée. Puis elle s’est essuyé le menton car elle ne sait pas cracher ».

Isidora ne restera pas. On en découvrira la raison. Mais l’empreinte qu’elle aura laissée dans la vie de Martine ? Elle est évidente et presque indescriptible. Parce qu’Isidora n’aura pas seulement donné confiance en Martine, elle lui aura permis de voir autrement et d’une bien belle manière ce qu’elle fait, crée, produit. Et surtout, de se voir elle, autrement. Et cette clairvoyance-là, c’est une sacrée belle fondation pour grandir, par la suite, dans ce monde où l’on a bien souvent oublié de prendre son temps pour analyser les choses, pour essayer. On a aussi nettement oublié d’être fier de soi. Et de rêver.

Merci à Dominique Périchon et à son récit de nous rappeler l’essentiel si joliment, si drôlement, si finiment. Et n’oublions pas, « il faut toujours se méfier des enfants qui ne ressemblent pas aux autres : ils sont capables de tout »

Coups de cœur, Romans pour ados

Annie au milieu / Émilie Chazerand / Sarbacane

Quand j’ai lu le résumé de ce roman, lors d’une énième visite en librairie, mon cœur a vrillé. Direct. J’ai aussitôt repensé à l’un de mes films préférés, petit bijou cinématographique, sorti en 2006. Seize ans, déjà ! Little Miss Sunshine. Je ne sais pas si vous l’avez déjà vu mais il faut le voir pour tout un tas de raisons. Surtout parce qu’il est barjo mais beau parce qu’il est barjo. Et magnifiquement inoubliable parce qu’il est beau parce qu’il est barjo.

Olive n’a même pas huit ans et sait déjà ce qu’elle veut. Elle a un rêve, celui d’être mini Miss. Oui, là vous êtes certainement en train de vous écrier « au secours » mais non, non, vous avez tort. Car ce n’est pas un film dégoulinant de paillettes et de malaise absolu, combo complètement probable dans l’univers des mini miss aux Etats-Unis, mais un road-trip incroyable, porté, mené par les membres d’une famille complètement à la dérive et complètement dingues, chacun à leur façon. Olive et son rêve se tiennent là, rayonnants de joie et d’innocence au milieu d’eux et de toute cette situation foutraque. C’est Olive qui les relie tous et leur offre un fil rouge vital. Pffffiiiiiouwaouh (c’est l’onomatopée d’un soupir d’admiration ça, non ?) KO total.

J’adore cette accroche « Everyone pretend to be normal » qui est bien mieux que celle en français qui est « une famille au bord de la crise de nerfs ». Cette phrase colle merveilleusement au roman d’Emilie Chazerand. Tout le monde fait semblant d’être normal (et moi j’ai un bac +12 en traduction). Et qu’est-ce que c’est, d’ailleurs, la normalité ?

Le roman « Annie au milieu » d’Émilie Chazerand me fait penser à ce film parce que j’y ai retrouvé les mêmes singularités qui font ressentir les mêmes choses. De manière puissante et presque violente. Dans le film, on retrouve cette folie déterminante, un portrait identique d’une famille à la dérive au sein de laquelle chacun doit trouver sa place, des interrogations semblables sur la norme, sur la normalité et logiquement donc, sur l’exclusion. Ces deux œuvres possèdent cet optimisme, cette joie incroyable qui accompagne votre lecture/votre visionnage pour finalement vous laisser coi, ce signifie -de manière plus limpide- que mon visage n’était que bouche bée et larmes torrentielles. J’ai refermé le livre, j’ai lu le générique de fin de film, j’étais incroyablement moche mais heureuse avec, vous pouvez aisément l’imaginer, mon visage inondé de mascara dégoulinant et de bave dégoulinante. Bref, j’étais ignoble mais je remerciais la vie toute entière.

La couverture n’est pas jaune comme l’affiche de Little Miss Sunshine mais l’ensoleillement est pourtant bien présent. Annie est au milieu et elle rayonne. « Elle irradie ».

« Velma et Harold sont le frère et la soeur d’Annie. Annie est « différente » . C’est comme ça que les gens polis disent. Elle a un chromosome en plus. Et de la gentillesse, de la fantaisie, de l’amour en plus, aussi. Elle a un travail, des amis et une passion : les majorettes. Et Annie est très heureuse parce que, pour la première fois, sa troupe aura l’honneur de défiler lors de la fête du printemps de la ville.
Mais voilà, l’entraîneuse ne veut pas d’elle pour cet événement : elle n’est pas au niveau, elle est dodue… Bref : elle est « différente » . C’est bête et méchant. Ca mord Annie et les siens, presque plus. Alors, qu’à cela ne tienne : Annie défilera, avec son équipe brinquebalante, un peu nulle mais flamboyante. Ses majorettes un peu barjo. Ses barjorettes, quoi
« 

Annie est différente, c’est comme ça que les gens polis disent…

La différence. C’est le grand thème de ce roman. La différence et surtout la manière dont est perçue cette différence.

Parlons de la trisomie, tout d’abord. Naturellement, il y a une floppée de personnes intelligentes et sensées qui perçoivent Annie comme tout être humain devrait être considéré : avec bienveillance. Mais il existe encore des gens qui sont juste abjects. Sans même le cacher, comme ces clients du Little Asia Mini Market, dans lequel Annie travaille, qui la traitent de « mongolita » et qui lui font des allusions sexuelles à gerber. Ou plus insidieusement, comme l’entraineuse de l’équipe de majorettes qui refuse qu’Annie défile avec la troupe, lors de la fête du printemps. Et ça, ça donne juste envie de tout casser et si ça doit être la gueule du gars qui dit ou de la meuf qui fait, alors tant pis. J’aime tellement la réaction de la maman d’Annie après coup, lorsqu’Elodie, l’entraîneuse de l’équipe de majorettes, annonce son infâme décision. C’est narré par la jeune fille elle-même :

Oh mon dieu, que ça soulage de dire ça. Et de le lire.

Annie. Elle est belle, lumineuse, innocente. Elle ne sera jamais aussi bien décrite que par son grand-frère Harold et sa petite soeur Velma, qui l’aiment infiniment. Les trois enfants de la fratrie prennent tour à tour possession de la narration et rendent le récit vivant et criant de sincérité. Cela peut être également extrêmement douloureux. Car la naissance d’une enfant trisomique, c’est un bouleversement. Avec un impact sur chaque membre de la famille. Sur la famille toute entière. Il y est difficile pour Harold et Velma de trouver leur place et de se sentir aimés pour ce qu’ils sont eux, et non parce qu’ils ne sont pas Annie. Il est difficile pour la mère de ne pas vivre cette vie rêvée d’architecte épanouie alors qu’elle doit enchaîner les rendez-vous et vivre sa vie telle une Sainte sacrificielle, au détriment des besoins des autres, de ses besoins à elle. Difficile de ne pas se sentir coupable, de ne pas se dire « avec les enfants, j’ai tout raté. Je les ai gâchés ». Il est difficile pour le père d’arrêter de se cacher derrière l’humour ou de rester toujours détaché, quitte à faire penser qu’il ne sait plus aimer. Avoir un enfant trisomique, c’est un bouleversement. Ce serait si facile si chacun pouvait aisément se l’approprier, ce bouleversement. Mais on le sait, rien n’est acquis car rien n’est linéaire et prévisible. Dans toutes les familles, c’est ainsi. C’est plus long et douloureux pour certaines. Seulement, si l’amour est présent, même s’il est enfoui, il renaîtra. Et dans ce roman, il renaît. Et quelle renaissance. Simple. Basique. Basique. Simple. Comme dans la chanson d’Orelsan qu’ils choisissent pour leur représentation de « barjorettes ». Simple. Basique. Basique. Simple. Et remarquablement bordélique ! Mais c’est beau, le joyeux bordel, non ?

Harold et Velma sont également différents et souffrent de cette différence. Harold, c’est un jeune adulte doté d’une grande sensibilité mais qui la freine, volontairement ou inconsciemment, on ne sait pas trop mais on devine. Il a choisi de stopper ses études sans le dire à sa famille, ce qui entraîne quelques complications jusqu’au drame que l’on sait inévitable. De plus, il est homosexuel. Et s’il y aujourd’hui une tolérance bien plus grande par rapport à l’homosexualité -il était grand temps, bordel- il est toujours difficile de l’avouer à ses proches, surtout quand on a une famille à l’équilibre plus que précaire. Voilà pourquoi Harold n’ose pas avouer que Camille est Camille. Et pas Camille. Il n’y a qu’Annie qui sait. C’est sans doute la plus perspicace, la plus intelligente, n’en déplaise à ce gros connard de psy qui l’a diagnostiquée avec un QI de 52 et rien d’autre. « Faites le deuil de ce qu’elle ne sera jamais ». On a le droit de l’insulter, lui aussi et de lui souhaiter une gangrène des testicules ? Bref, Annie sait mais les autres ne voient pas ou ne veulent pas voir. Harold devra prendre du recul, s’éloigner quelques temps pour réfléchir à cette différence qui le constitue et qui reste à montrer au reste du monde. Et à sa place qu’il doit considérer. Ce n’est en rien plaisant. « J’en ai les larmes aux yeux, tout à coup. Je suis fatigué. Parce que c’est fatiguant, d’essayer. Toutes les heures. Et d’échouer, toutes les heures ».

Velma se sent différente, elle aussi. Elle a ce statut complexe de cadette et de celle qui arrive après. Après Annie. Toute la lecture durant, nous sentons ce poids qui la heurte, elle qui ne se sent pas légitime d’être née. C’est terrible de dire cela. C’est cependant ce qu’elle arrive enfin à exprimer à sa mère. C’est vital. Elle doit poser la question. Sinon, elle meurt, elle se meurt. « Pourquoi tu m’as faite ? » On ne peut pas s’établir en psy de pacotille et se demander si c’est à cause de cette culpabilité d’exister qu’elle ressent le monde avec une telle hypersensiblité mais on ne peut s’empêcher de se dire que cela fait d’elle une personne clairvoyante, dans le sens où elle voit la vie comme elle est. Parfois elle est moche et douloureuse, parfois elle est belle jusque dans ses moindres détails.

Oui, Velma fait des listes. Toutes aussi belles et vraies les unes que les autres. Et moi je fais des photos floues en fin de journée sur mon canapé à côté d’un petit garçon scotché à mon bras qui me fait trembler et qui rigole, en plus. Je le mets sur « ma liste des choses que j’aimerais éviter mais je ne peux pas parce qu’on ne rejette jamais un petit garçon choupinet scotché à son bras ».

Tous les personnages ont leur importance, leur sensibilité, leur manière de voir le monde et de cohabiter avec lui. Tous sont merveilleux. La grand-mère un peu foldingue mais fragile, la tante-dont-tout-le-monde-a-besoin, Hui évidemment, Camille qui bouscule parce qu’il faut, les poules confidentes, maman Zhou qui réalise des maillots de compétition comme un feu d’artifice avec des cristaux facettes blancs et des capes en plumes d’autruche roses. Tous ces personnages gravitent autour d’Annie et Annie est au milieu, elle fait office de soleil. C’est le « sentiment océanique » de Romain Rolland. Velma la décrit très bien, « cette impression soudaine de ne faire qu’un. De faire corps. Cœur commun. Avec l’univers tout entier ». Nous lecteurs, nous faisons partie de cet univers tout entier. Avec cette impression magnifique. Ce sentiment océanique. Qui nous fait nous sentir joyeux, libérés, vivants.

Alors, la fameuse différence dans tout ça ? Elle rend les gens meilleurs, plus sincères, aussi. Elle n’est pas faite pour éloigner les gens les uns des autres mais bel et bien pour les relier. Et pour leur permettre de trouver LA place, enfin, qu’importe si c’est celle d’une planète naine qui n’existe plus. C’est la place parfaite. Celle qui convient.

L'avis en vrac !

Bande de poètes / Alexandre Chardin / Casterman

Écrire en alexandrins, c’est clairement zinzin.

Battre la mesure douze fois, sans flancher !

Mais quand on aime, il paraît qu’on n’compte pas, hein ?

Je n’suis pas douée, mais je suis sincère, okay

J’ai envie que vous imaginiez la façon,

la façon dont j’prononce Alexandre Chardin.

C’est un joli tohu-bohu d’exclamations,

qui prouve à quel point j’aime tant cet écrivain

Il sait rêver comme on devrait le faire encore.

Tous ses récits parlent si bien de cette vie

qui souvent nous malmène par des faits retors,

mais qui cache maintes réalités bénies

Bande de poètes, ce roman écrit en vers,

narre les aventures de jeunes ordinaires

qui n’peuvent à priori pas être des amis,

leurs origines les condamnent à être ennemis.

Le fils du maire, les jeunes défavorisés

sont sensés se détester d’emblée, c’est vrai, non ?

Non. L’auteur nous l’fait bien comprendre heureusement.

Qu’importe ce qu’en pensent les gens, les parents.

Pour abolir toutes ces barrières non visibles,

pourtant si réelles – certainement indicibles-

l’auteur a pensé à de merveilleux fils rouges.

De l’amour, oui ! Et d’la musique, faut qu’ça bouge.

Même les clichés autour de la musique dégagent.

Pour notre plus grand plaisir, fini cet outrage !

La trompette oh oui c’est un bien bel instrument

qui peut s’marier avec le flow, évidemment.

Quant à la violence, elle n’est pas occultée.

Les mots douloureux et ceux qui font déguerpir

sont libérés, sont criés et sont dénoncés.

Trouver refuge, pour enfin réapprendre à vivre.

Fil rouge, n’oublie pas les pouvoirs de l’amitié !

Ce chouette roman est en empli, c’est un fait.

On l’referme en riant, vous n’avez pas idée…

Y a d’la joie, comme dans cette chanson de Trenet.

Alexandre Chardin est un magicien, non ?

Même qu’il met des nœuds papillon, c’est un signe !

Il écrit les mots justes et ceux qu’on imagine,

qu’on n’ose parfois pas clamer, parce que bon…

Il est temps de changer et d’oser, haut et fort

On s’en fiche et on s’en fout et on s’en balance

Des préjugés, des toutlmondedit, des convenances

Lisez c’récit, vous comprendrez, gentils cadors !

Romans pour ados

Faire chavirer les icebergs / Aurore Gomez / Magnard

« Tu sais Aurèle, il n’y a rien de plus beau qu’un iceberg qui chavire. Pour l’avoir vu, je peux te dire qu’on a l’impression d’assister à la naissance d’une montagne ».

Je ne pouvais commencer ce texte que par ça, comme ça. Par cette citation précise et pas une autre. Car, sachez-le d’emblée, aucune autre phrase ne reflète aussi bien l’entièreté d’un récit qui mêle de manière improbable mais magnifique le chaos d’une vie sur le point de changer et la splendeur de celle-ci quand enfin, la chrysalide devient papillon. Et puis, j’aime cette citation rien que parce qu’elle contient ce prénom, Aurèle. Parce que ça me fait penser à tous les prénoms des empereurs romains que j’affectionne (pas tous hein, Commode et Claude, ça fait moins rêver, on est d’accord). J’aurais adoré appeler mon fils Octave ou Auguste, César et surtout, Hadrien. Hadrien. Parce qu’à chaque fois que je l’aurais interpellé, j’aurais pensé aux mots somptueux de Marguerite Yourcenar. « Tout bonheur est un chef-d’œuvre : la moindre erreur le fausse, la moindre hésitation l’altère, la moindre lourdeur le dépare, la moindre sottise l’abêtit ». Quoique, en y repensant, si on y juxtapose une phrase du quotidien, ça devient un chouya bizarre. « Tout bonheur est un chef-d’œuvre : la moindre erreur le fausse, la moindre hésitation l’altère, la moindre lourdeur le dépare, la moindre sottise l’abêtit. Hadrien, range ta chambre ! » Voilà, j’ai abandonné l’idée, d’autant plus que si on n’a pas la ref, on risque de se dire que j’ai lâchement cédé à la mode de mettre des h partout dans les prénoms même quand on ne s’attend pas à avoir de h dans ces dits prénoms. Juhlia. Vhictoire. Lhucas. Basthien. Hadrien. Je ne juge pas. Ou peut-être un peu, si. Je présente ici mon Mea Culpa antiquement de circonstance. Pour clôturer le sujet, il faut bien avouer que prénommer mon fils comme un empereur, ça n’aurait pas fonctionné tout court. Les empereurs romains étaient de grands tordus sanguinaires. À divers degrés mais quand même. Est-ce que c’est vraiment l’image qu’on se fait d’un petit enfant choupinet et innocent ? Non. Donc, Oscar, quoi. Et ça lui va très bien.

Je m’égare, je m’égare, je m’égare. Mea Culpa bis.

Faire chavirer des icebergs. En dehors d’une réalité climatique certaine, cette expression est, vous l’aurez compris, une métaphore. De la vie de notre héros, Aurèle ou, en tous cas, de ce qu’il devrait faire de sa vie. C’est cette allégorie qui est représentée sur la première de couverture.

Contrairement à ce que l’on pourrait penser de prime abord, la vie d’Aurèle ne va pas prendre une tournure mélo-dramatique comme dans un téléfilm américain de TF1 du lundi après-midi. Il n’a pas véritablement de problème, ce genre de Problème, non, il y a juste une possibilité qui s’offre à lui, qui chamboule tout ce qu’il est profondément et qui va le pousser à se révéler aux autres. Vous n’avez rien compris à mon topo digne d’un résumé télé 7 jours d’un téléfilm américain de TF1 du lundi après-midi ? D’accord, d’accord. Lisez plutôt cette présentation de l’éditeur:

« Aurèle est ravi. En décrochant un stage de cinq semaines loin de chez lui, il va pouvoir prendre le large et s’éloigner de sa mère vraiment collante. Là-bas, c’est un tourbillon qui l’attend. Il travaille sur un incroyable chantier au bord des fjords, découvre un tout autre monde que le sien. Et surtout, très vite, il fait la connaissance de Matthias, dont le regard bleu pur et le charisme de dingue l’électrisent instantanément. Aurèle a beau savoir qu’il est en couple avec une fille, impossible de ne pas penser à lui ou de passer à autre chose. Et si c’était le moment d’assumer qui il est ? D’oser se dévoiler ? De faire chavirer l’iceberg, en quelque sorte ? »

Bon, avant de passer à la suite, il faut que je rectifie un élément du résumé ou, tout du moins, que j’apporte quelques précisions. Sa mère collante, elle est professeure-documentaliste. Oui, cela est énoncé comme ceci, texto dans le roman, et parce que j’ai rarement vu cette appellation écrite noir sur blanc, il fallait que le signale. Qu’elle soit collante, un peu parano, stressée de la vie à la folie, qu’importe, c’est une professeure-documentaliste collante, parano, stressée de la vie à la folie. Et ça c’est carrément cool.

Précision faite ! Revenons à ce résumé qui donne envie et qui évoque quasiment tout ce que vous allez lire de chouette dans ce récit, même s’il aurait fallu y ajouter les mots tricot, Dracaufeu et sorbet aux algues. On y reviendra plus tard.

Ce roman va vous dépayser, dans un premier temps. Certes, vous aurez toujours un pied en territoire connu sur quelques pages, mais vous allez aussi enfoncer l’autre pied dans ce territoire merveilleux des Grands Fjords. Et ce sera délicieux. Aussi doux et aérien que la chanson « Waves » de Dean Lewis que l’autrice conseille d’écouter en lisant la première partie du roman (j’aime beaucoup l’idée d’une playlist qui matche avec la lecture en cours). Vous allez découvrir la ville de Clarée, laquelle s’est construite à l’embouchure d’une rivière, en plein coeur du parc des Grands Fjords. Ciel, terre, océan, rivière, tout y est grandiose. Et, petit bonus, Clarée est la capitale du tricot. « Là-bas, c’est une institution. Il y a des cafés tricots où les gens se retrouvent avec leurs aiguilles et leurs pelotes. Même les hommes ». Même Aurèle ? Oui. Est-ce qu’il deviendra un dieu du tricot ? Spoil : non, mais il ressortira de ses tentatives tricotesques une production qui prendra tout son sens. Franchement, tout ça donne terriblement envie de décrocher nous aussi un stage à Clarée juste pour nous y immerger. Maintenant, là, tout de suite. Ce n’est pas comme si nous n’en avions pas besoin, en plus.

Parlons d’ailleurs, dans un deuxième temps, de ce fameux stage sur un incroyable chantier des Fjords. Que j’aime le fait que ce héros de ce roman soit en lycée professionnel, un établissement qui enseigne les différents métiers du bois, plus précisément. On a davantage l’habitude de découvrir des parcours standardisés, en filière générale dans des lycées lambdas. Mais ici, on a cette occasion remarquable, presque inespérée malheureusement, de prendre connaissance de la voie professionnelle. Et quand on saisit l’importance et la beauté de ce que va entreprendre Aurèle sur ce chantier, ça rend la chose plus admirable encore. En effet, l’adolescent va aider à créer des « bulles de vie », sortes de chambres individuelles, dans un Centre de Santé. Voilà. C’est essentiel de valoriser cette orientation et Aurore Gomez le fait admirablement bien. Surtout quand on sait que, parallèlement, certains réalisateurs et autres producteurs comme un certain Hanounou, tentent de mettre à mal une image d’élèves très souvent en souffrance dans des cursus scolaires considérés comme atypiques. Petit conseil bien bien bien orienté du jour : n’allez pas voir le film « Les Segpa » qui sort, qui sort quand déjà ? Je m’en fiche. Jamais, je l’espère. Valoriser ces parcours qui sortent de cette normalité brandie sans cesse, ces filières, ces élèves, ces enfants, il faut le faire. Absolument. J’ai été professeure-documentaliste deux années durant en lycée professionnel et je peux vous dire que si deux heures de route ne me séparaient pas de mon domicile, j’y serais sans doute encore aujourd’hui. Je travaillais dans un CDI recouvert de moquette, aménagé dans une ancienne salle de classe mais ce n’était pas important. J’ai créé un lien avec pas mal de ces grands gars de 16 ans et plus. Ça, c’était important. Et, si tout n’a pas été évident, j’ai vécu des moments de grande intensité grâce à eux. Notamment -et je suis obligée de m’épancher ici pour dégommer une fois pour toutes les préjugés- des instants hors du temps vécus dans une petite ville vosgienne qui possède un théâtre dont la scène s’ouvre sur la forêt. En une semaine, j’ai vu des miracles sur des jeunes hommes qui s’en contrefichaient, le premier jour, de pratiquer le théâtre dans une ville située à 45 minutes de leur lieu d’habitation. C’était pas l’Espagne, quoi. J’ai vu des adolescents se redresser, mais vraiment se redresser, d’autres parler, mais vraiment parler. Et lorsqu’au terme de leur semaine théâtrale, ils ont achevé la représentation qu’ils avaient préparée avec une comédienne, j’ai vu. Un truc indicible, presque. Sachez seulement que je n’étais plus moi-même lorsque je les ai contemplés sur scène, se tenant la main pour rejoindre la forêt au son de « Sabali » d’Amadou et Mariam. Je n’étais que larmes tant c’était beau, ce spectacle qui s’offrait à moi tel un cadeau. Bon sang, c’est ce genre de choses qu’il faut valoriser. Parce qu’il existe encore des gros cons -excusez-moi mais je suis obligée- qui pensent que la filière professionnelle est une sous-filière pour les sous-doués. Comme les grands-parents de Matthias qui, lorsqu’ils font la connaissance d’Aurèle, lui déclarent : « Un lycée professionnel« . « Avez-vous tout de même l’ambition de poursuivre vos études après votre bac ? » Vous visualisez le truc ? Et vous entendez ce ton condescendant ? Celui qu’on pourrait employer en ramassant la crotte encore chaude de son chien, sans les gants mais avec une mimique dégoutée de circonstance.

On se dirige vers un troisième temps, non ? Vous remarquerez que j’essaye d’écrire des articles davantage structurés. Le troisième temps est important. Car je vais vous parler du thème principal du roman : l’homosexualité. Depuis quelques années, il y a de plus en plus de romans jeunesse qui mettent en scène des adolescents homosexuels. Enfin. Merci. Ce n’était pas trop tôt. Et on apprécie. Aurèle fait partie de ces personnages mais ce qui est abordé différemment dans ce livre, c’est que l’homosexualité n’est pas présentée comme un problème car le véritable problème, il est autre pour Aurèle. Il s’agit d’avouer au beau Matthias qu’il est amoureux de lui. Ce genre de pas qui semble impossible à franchir tant l’enjeu est immense. Ce genre de pas que chacun de nous a fait ou fera un jour. Si on pouvait le faire bien, en justesse, délicatement, et pas comme des gros bourrins d’éléphants soldats en pleine marche militaire dans la jungle -ça vit dans la jungle les éléphants ?- ce serait encore mieux. Et, c’est vrai, il y a également la question de la révélation de l’homosexualité à son entourage et à sa mère -la prof doc flippée pour rappel. Cependant, la question n’est pas de savoir si Aurèle va le faire mais plutôt de savoir quand il va le faire. Cette appréhension est énoncée dès le tout début du roman.

Mais sinon, on est d’accord, non ? Freddie Mercury était un mec épatant. D’ailleurs il EST épatant. Freddie Mercury, c’est comme Elvis, en fait il n’est jamais vraiment mort. Parole de prof-doc collante, parano et un peu stressée de la vie mais pas mal fan de Queen, aussi.

Si vous avez bien lu cet extrait, vous avez deviné qu’ Aurèle possède un sens de la dérision hors du commun. Quitte à oublier qu’il est temps de dire les choses, sérieusement. Mais ça, ça prend parfois un peu de temps. Il y a, avant toute chose, une histoire d’amour à vivre et entre Aurèle et Matthias, ça ne déconne pas. On est sur du high level (oui, je spoile un peu mais je ne peux pas ne pas vous parler de cette histoire d’amour qui finit par aboutir, et pas à la toute fin du récit, dieu merci, on n’est pas en train de regarder l’épisode 15678 des « Feux de l’amour »). Elle est bien trop belle, cette histoire. Elle est poussée par des déclarations comme on les aime…

« Aurèle, je t’aime. Comme un dingue. J’aime ta franchise. J’aime sentir que je t’ai blessé par maladresse. J’aime la façon dont tu exprimes tes sentiments. J’aime tes yeux, qui cherchent à savoir si je ne mens pas, et ton corps musclé ».

Et aussi de jolies premières fois dont LA première fois décisive, qui se vit dans une soupente poussiéreuse et même que c’est beau, malgré la poussière, les petites bêtes et tout ce genre de choses qui ne font pas rêver, en général.

Néanmoins, l’homophobie n’est pas occultée dans ce roman. Il y a des réalités qu’on n’aimerait pas lire et encore moins connaître. Mais elles existent. Et elles sont dites ici.

Matthias a été victime et ce, doublement. Car il n’a pas seulement subi la violence, il a aussi été sanctionné par son établissement scolaire pour s’être défendu. Alors bien sûr, il faut parler d’amour, du grand Amour, mais aussi de ce qui est moche et insupportable. Peut-être qu’un jour, à force de dénoncer et surtout, de parler, les amoureux homosexuels pourront vivre naturellement. « J’enviais le couple hétéro qui se roulait des pelles à quelques mètres de nous. Ils pouvaient exposer leur amour aux yeux de tous. Est-ce que serait possible, un jour, pour nous ? ».

1.2.3 et 4 ! Quatrième temps. Les personnages. Ceux qui gravitent autour d’Aurèle et de Matthias. Ils sont tous géniaux et ils possèdent tous leur importance à un moment ou à un autre du récit. Il y a Will, le presque-frangin débarqué dans la vie d’Aurèle en même temps qu’un beau père sympathique qui a toujours une main réconfortante à poser sur une épaule. Des copains aux noms de Pokemon (Dracaufeu ! Dracaufeu, quoi). Un maître de stage aussi bienveillant qu’un père et que tout père devrait être. La maman prof-doc qui, en réalité, n’a de rien d’une psychopathe psychotique, c’est simplement une maman et une maman a peur, par essence, non ? Et enfin, il y a une nouvelle amie, waouh. Sensationnelle Louisa. Aurèle la rencontre à l’aéroport alors qu’il se rend à Clarée pour la première fois. Leur rencontre est… comment dire ? Assez atypique. Disons que le soutien-gorge tombé du sac de Louisa se retrouve malencontreusement accroché au pull jaune moutarde d’Aurèle, « un peu comme une guirlande sur un sapin de Noël ». Cela ne gêne pas Louisa le moins du monde. Elle est ainsi, spontanée, pleine de vie, attachée aux choses essentielles, le reste on s’en fout, après tout. Et le tricot en fait partie, de ces biens essentiels. Vous passerez de nombreux passages en compagnie de Louisa dans le café tricot qu’elle affectionne particulièrement. Certains évènements décisifs peuvent même se dérouler dans des cafés tricots. J’aime tellement Louisa. C’est comme si son personnage était entouré d’une aura lumineuse faite pour éclairer la vie de tous. Y compris celle des lecteurs. C’est pas fou, ça ?

On en arrive à la conclusion. Elle va être simple et je l’espère quelque peu délicate, à l’image du roman. Je suis éprise de ce livre, j’image que cela doit se ressentir. Je crois qu’outre tous les messages primordiaux et par moment graves qu’ils nous transmet, je l’aime profondément parce que c’est un livre joyeux. Et cette joie, je m’y accroche corps et âme. Le bonheur est aussi simple qu’un p’tit meeting amical sur la plage consacré à refaire un monde qu’on aime gentiment détester. Sans oublier les éléments IN-DIS-PEN-SA-BLES pour que ce moment joyeux soit parfait : une jolie couverture en patchwork, des flûtes traditionnelles de la région des Grands Fjords et un bon sorbet de glace aux algues.

Vous avez là l’occasion de revivre cette insouciance qui semble s’échapper de notre vie, actuellement. Grâce à ce roman, on peut à nouveau. On peut. Et c’est si précieux.